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Soulagement, inquiétudes, enjeux humanitaires et migratoires: l'union européenne face à la chute du régime de bachar al-assad

Dernière mise à jour : 20 janv.

Après l’annonce de la chute du régime de Bachar al-Assad, le 8 décembre 2024, l’Union européenne a manifesté son soulagement, bien qu’elle demeure prudente. Les prochaines semaines seront déterminantes pour l’avenir de la Syrie et de son peuple, et l’Union européenne compte bien être un acteur de cette transition syrienne. Assurer la stabilité en Syrie est une priorité pour le monde libre, au risque de voir le pays plonger dans l’islamisme radical. Pour ce faire, la communauté internationale doit se mobiliser pour aider à la reconstruction de la Syrie. Une telle implication suppose également la levée des sanctions internationales imposées à la Syrie, ainsi qu’un possible retrait du statut terroriste de la HTC, pour normaliser ce nouvel acteur. 


Crédits: LOUAI BESHARA/Archives Agence France-Presse
Crédits: LOUAI BESHARA/Archives Agence France-Presse

La chute du régime de Bachar Al-Assad

Dimanche 8 décembre, à la surprise et au soulagement général, un tyran est tombé. En une dizaine de jours seulement, une coalition rebelle menée par l’organisation islamiste l’HTC a fait une avancée fulgurante sur le territoire, pénétrant finalement dans la capitale, à Damas. Suite à cela, Bachar al-Assad a pris la fuite vers la Russie, alliée de longue date du dirigeant. Son règne aura plongé le pays dans une guerre civile de près de 13 ans, qui a sculpté les contours de la Syrie actuelle. 

Bien que les récents évènements marquent la fin du règne sanguinaire du clan al-Assad, la situation reste encore incertaine pour la Syrie. Le pays se retrouve dans un tournant critique, confronté à l’urgence de reconstruire des institutions, de garantir la stabilité, et d'assurer une transition politique inclusive pouvant assurer la paix à long terme.


Un pays fragmenté par une longue guerre civile

Pour comprendre les défis auxquels la Syrie est actuellement confrontée, il faut revenir 13 ans plus tôt.

En 2011, alors que le pays se soulève face à un gouvernement oppressif, l’espoir anime le peuple syrien. C’est une première tentative de démettre Bachar al-Assad de ses fonctions, alors que son régime autoritaire se renforce depuis qu’il a succédé à son père en 2000. Le Printemps arabe se fracasse contre une répression violente du régime. Alors que le camp de la résistance et les forces du régime se militarisent de plus en plus, le pays bascule dans une guerre civile qui va durer 13 longues et terribles années. Le pays entier devient un champ de bataille, les civils sont les principales victimes des bombardements et des attaques chimiques répétés du régime. Depuis 2011, c’est plus de 500 000 personnes qui ont été tuées par la cruauté et la répression du gouvernement de Bachar al-Assad. Une estimation de l’ONU en 2023 rapporte également le déplacement de près de 13 millions de Syriens, dont la moitié hors du territoire. 


Une réaction européenne teintée de prudence

L’Union européenne s’est rapidement prononcée, la cheffe de la diplomatie soulignant ce dénouement « positif et attendu depuis longtemps ». Les dirigeants européens se sont également réjouis de l’achèvement de cet « État de barbarie », comme le qualifie Emmanuel Macron, le président français. Le soulagement européen se teinte toutefois d’inquiétude face à l’instabilité de la région. Il est encore trop tôt pour déterminer le chemin que va prendre la Syrie. L’effondrement du régime, la présence d’acteurs multiples aux intérêts divergents, ainsi que le dévastement de la Syrie après la guerre et les catastrophes naturelles représentent des obstacles majeurs pour une transition vers la paix. Sans compter que le principal acteur du soulèvement, l’Hayat Tahrir al-Cham (Organisation de Libération du Levant en français), dirigée par Abou Mohammed al-Joulani et affiliée à Al-Quaïda, est une organisation classée terroriste par l’Union européenne. Au même titre que l’ancien dictateur, HTC fait l’objet de sanctions européennes et de plusieurs condamnations pour ses crimes. Face à la nature islamiste de cet acteur controversé, l’UE demeure prudente.


Vers une implication politique et financière de l’UE

Le 16 décembre dernier, les ministres des Affaires étrangères des États membres de l'UE se sont réunis à Bruxelles avec Kaja Kallas, la Haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. La rencontre avait pour objectif d’établir une position commune concernant la politique au Proche-Orient, abordant notamment l’enjeu de la Syrie. Kaja Kallas a alors appelé à une transition politique pacifiste de la Syrie après le renversement de Bachar al-Assad. 

Un des défis majeurs pour l’Union européenne est d’arriver à déterminer un interlocuteur fiable afin d’apporter son soutien au rétablissement de l’ordre et de la stabilité dans le pays. Plusieurs contacts diplomatiques ont déjà été établis, notamment avec des membres de l’HTC et au vu du rôle que va jouer cette organisation pour l’avenir de la Syrie, il est nécessaire d’envisager de normaliser les relations avec ce nouvel acteur. L’Union européenne a d’ailleurs choisi d’évaluer l’HTC selon ses actions et le rôle qu’il jouera dans la reconstruction du pays. Elle a également fait part des principes que devront suivre les nouveaux dirigeants syriens : le respect et la protection des minorités, une transition politique inclusive, l’établissement d’institutions solides pour assurer la stabilité et l’absence de radicalisation. Cette déclaration est révélatrice de la volonté européenne de voir une Syrie renaître sur des bases stables et respectueuses des droits fondamentaux.

L’UE a également fait part de sa volonté de réouvrir sa représentation à Damas, ce qui représenterait un pas majeur vers les pouvoirs en place. Cette décision est marquante, alors que les relations avec Damas sont rompues depuis 2011.

Du côté financier, Bruxelles compte aussi apporter son soutien pour assurer une reconstruction rapide du pays. Un pont aérien humanitaire passant par la Turquie vient d’être mis en place afin d’envoyer une aide à une population qui doit faire face à une profonde insécurité alimentaire et à une défaillance des systèmes médicaux. Quatre millions d’euros vont également être débloqués pour cette année.


La question migratoire, un enjeu central pour les pays de l’UE

Évidemment, la question migratoire est arrivée sur la table dès l’annonce de la chute du régime. Préoccupation grandissante pour l’Union européenne depuis quelques années, la fin de la guerre civile amène de nouvelles questions. Comment faut-il gérer les réfugiés syriens présents sur le territoire européen ? Que faire des actuelles demandes d’asile ?

Plusieurs États européens (France, Allemagne, Danemark et Suède notamment) ont suspendu les demandes d’asile des citoyens syriens, soutenant qu’il est à présent nécessaire de réévaluer la situation. Cette suspension pose question car la situation pourrait mettre des mois à se stabiliser, et en cas de rechute autoritaire, les traitements de demandes d'asile auront pris un retard non négligeable. D’autres États membres, comme l’Autriche, sont allés plus loin, entamant un renvoi de certains réfugiés syriens vers leur pays d’origine. Le risque d’une récupération politique par l’extrême droite, et d’un discours de plus en plus anti- migratoire, est à craindre en Europe.

Toutefois, selon Magnus Brunner, le Commissaire européen aux Affaires intérieures et à la Migration, un retour forcé des Syriens n’est pour le moment pas envisagé. Si les retours volontaires sont, eux, encouragés, notamment à travers d’incitatifs financiers, l’UE s’engage à continuer de respecter le principe de non-refoulement et le respect des droits fondamentaux. 


Sources :











 
 
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