Que peut faire l’Union européenne face aux crises naturelles? L’exemple de la crise espagnole de DANA.
- Alexandre Brague Medina
- 9 déc. 2024
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Dernière mise à jour : 9 déc. 2024
Entre les 29 et 30 octobre derniers, des inondations sans précédent ont touché les provinces espagnoles de Valence, de Castille-La Manche et d’Andalousie. Elles ont coûté la vie à environ 250 personnes et causé des dégâts majeurs dans toutes les villes concernées. Ces inondations ont été provoquées par une très forte pluie, conséquence d’une “goutte froide” dont les effets sont renforcés par le changement climatique. Cette catastrophe naturelle à été baptisée “DANA” (“Dépression Isolée à Niveau Élevé).
Cet épisode est vécu comme une véritable crise naturelle et humaine en Espagne puisque de nombreuses familles ont perdu leur logement et se sont retrouvées à la rue du jour au lendemain.
La crise de DANA a donné lieu à de vives polémiques quant à la gestion de la crise et la responsabilité des parties prenantes. En effet, une grande partie de l’Espagne accuse le gouvernement régional et national de ne pas avoir prévenu les populations du risque d'inondation et d’être intervenus beaucoup trop tard. Face à cette catastrophe d’une ampleur sans précédent, le Premier ministre espagnol Pedro Sánchez a rapidement sollicité l’aide de l’Union européenne. Il a affirmé que « Le temps est venu pour l’UE de nous aider » (ElMundo) dans une conférence de presse tenue le lendemain des inondations.

Qu’en est-il de l’Europe? Comment l’Union européenne peut-elle venir en aide aux populations touchées par la crise DANA?
“L’Europe est prête à aider”. Ce furent les paroles d’Ursula von der Leyen le jour suivant la catastrophe. Une semaine plus tard, la Commission européenne insistait toujours sur le fait qu’elle était “prête” à “prêter assistance” aux autorités espagnoles. Mais que peut réellement faire l’Union européenne?
L’Union européenne dispose de deux moyens principaux pour venir en aide aux crises liées aux catastrophes naturelles.
Le premier est le Mécanisme de Protection Civile. Il permet de mobiliser rapidement des ressources opérationnelles, matérielles ou humaines, en fonction des besoins spécifiques des États touchés. Pour bénéficier de cette assistance, un État doit en faire la demande officielle, ce qui permet d'activer le processus d’évaluation par la Commission européenne. L’État concerné dispose d’un délai de douze semaines à compter des premiers dommages pour transmettre un bilan détaillé des impacts subis. La Commission examine ensuite cette demande et détermine, selon les dégâts, le montant de l’aide financière à attribuer. En 2023, ce mécanisme était doté d’un budget global de 1,4 milliard d’euros.
Le 8 novembre, le Premier ministre espagnol, Pedro Sánchez, a officiellement sollicité l’aide de l’Union européenne suite aux graves dégâts causés par la DANA. De plus, il a annoncé des mesures de soutien d’environ 10 milliards d'euros. Cependant, le président de la Communauté Valencienne, Carlos Mazón, a estimé les besoins financiers de sa région à 31,4 milliards d'euros.
Nous voyons donc que les aides européennes ne permettent pas vraiment un accompagnement à la hauteur des besoins de Valence.
À moyen terme, l’Union européenne peut aussi offrir son aide à travers le Fond de Solidarité, utilisé afin de canaliser l’aide financière destinée à faire face aux dommages causés par les catastrophes naturelles. Mais encore une fois, cette aide ne semble pas pouvoir “sauver” les communautés touchées par la DANA. Le plus grand décaissement du Fonds de Solidarité de l’UE a été utilisé pour faire face aux tremblements de terre qu’a subi l’Italie entre août 2016 et janvier 2017: soit 1, 196 milliards pour des dommages estimés à 22 milliards d'euros, ce qui ne représente que 5% du total des réparations.
Face à une catastrophe extraordinaire, l’Espagne demande des mesures extraordinaires à l’Union
Le vendredi 8 novembre, Pedro Sánchez a demandé au Conseil européen et au Parlement “l’approbation, en urgence, d’un nouveau règlement appelé Restore” qui permettrait de “reprogrammer les fonds de cohésion FEDER et FSE+, pour consacrer une partie de ces ressources à atténuer les dommages causés par des catastrophes naturelles” (El Diario).
Le Premier ministre espagnol fait référence au Fonds Européen de Développement Régional (FEDER) qui est doté d’un montant total de 226 milliards d’euros et au Fonds Social Européen + (FES+), principal instrument destiné à investir dans les personnes touchées par une catastrophe naturelle et à soutenir l’application des droits sociaux. Ces fonds sont dotés d’un budget annuel de 143 milliards d’euros.
Pour l’instant, ces demandes n’ont pas été approuvées par la Commission. Cependant, celle-ci a offert à l’Espagne plus de marge budgétaire afin de faire face à la situation d’urgence et a rappelé au gouvernement espagnol qu’il est possible de réaffecter des crédits des fonds de cohésion ainsi que du plan de relance et de résilience :
« En ce qui concerne les inondations en Espagne, la Commission continuera à apporter tout le soutien nécessaire à ce pays pour faire face à cette situation difficile et, bien entendu, cela concerne également les règles budgétaires », a indiqué le Vice-président économique de l’exécutif communautaire de l’Union européenne, Valdis Dombrovskis.
L'Union européenne face à l'ampleur des crises naturelles : limites et défis après la catastrophe de la DANA
Face à la crise naturelle engendrée par la DANA en Espagne, l’Union européenne a activé ses mécanismes de solidarité (Mécanisme de Protection Civile et le Fonds de Solidarité) mais ces aides semblent insuffisantes pour couvrir l'ampleur des dégâts. Bien que l'UE ait exprimé sa volonté de soutenir l’Espagne, le budget alloué aux interventions reste limité et les demandes de fonds supplémentaires n'ont pas encore reçu d'approbation.
Cette situation soulève la question de la capacité réelle de l'UE à répondre à des catastrophes d’une telle envergure et met en lumière les défis liés à la gestion des crises naturelles dans un contexte de changement climatique.
Les prochaines étapes seront déterminantes pour évaluer si l’Union pourra répondre de manière plus adéquate aux besoins urgents des populations européennes affectées par des catastrophes naturelles.